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Sébastien Gauthier prend le flambeau de l’École de théâtre professionnel

Sébastien Gauthier, coordonnateur de l’École de théâtre professionnel du Collège Lionel-Groulx. (Photo Claude Desjardins)

Sébastien Gauthier prend le flambeau de l’École de théâtre professionnel

Publié le 07/04/2019

«On commence par où?», questionne Sébastien Gauthier en s’installant à une table du café Les Allumé(e)s, au centre-ville thérésien. On connaît bien le cofondateur du Petit Théâtre du Nord, tout comme le citoyen engagé qu’il est, son passage à la coordination de l’École de théâtre professionnel (ETP) du Collège Lionel-Groulx s’est fait en douce, lui qui attendait d’avoir fait le tour du propriétaire et de s’y sentir confortable avant de s’exprimer publiquement sur l’avenir immédiat de cette institution qui forme une bonne partie de tout ce qui bouge sur et autour des scènes québécoises et au-delà.

En poste depuis septembre (il en partage la responsabilité avec Carl Poliquin), Sébastien Gauthier succède alors à Ghyslain Filion, qui avait pris le relais de Jean-Luc Bastien, il y a de cela une vingtaine d’années. Avant ça, il y avait eu Sébastien Dhavernas et le fondateur de l’Option-Théâtre lui-même, Jean-Robert Rémillard. Quatre directeurs en 50 ans, c’est bien peu aux yeux du principal intéressé, qui a été formé à Lionel-Groulx (diplômé en 1997) et qui a commencé à y enseigner en 2005.

Faire avancer les choses

«Ghyslain (Filion) a fait un boulot exceptionnel sur le plan de la pédagogie», affirme d’emblée le nouveau coordonnateur qui ne s’inscrit pas moins dans la lignée tout à fait humaine des observateurs critiques qui, occasionnellement, châtient volontiers ce qu’ils aiment bien. «Ces dernières années, j’ai chialé, mais pas contre des individus, insiste-t-il. C’était plutôt à l’endroit de cette école qui est devenue un gros paquebot.»

Pour Sébastien Gauthier, qui pointe toutes ces institutions où s’établissent de longues permanences (il nomme au passage le TNM), il peut s’agir d’un facteur de ralentissement, quand ce n’est pas un objet de chasse gardée (comprendre: un cercle fermé qui, malgré la meilleure volonté du monde, s’ouvre peu à la nouveauté, aux nouvelles têtes). C’est pratique, c’est confortable pour tout le monde, dit-il, d’avoir un directeur qui fait tout, qui pense à tout.

«Mais je suis de ceux qui croient qu’il faut que ça roule pour que les choses changent. C’est pour ça que j’ai accepté ce poste. Je veux faire avancer les choses, mais pas tout seul» , dit-il en faisant allusion à son collègue Poliquin, mais aussi à tous ceux et celles qui travaillent à l’ETP, y compris son prédécesseur qui est partie prenante de ce renouveau.

En toute cohérence avec ce qui précède, Sébastien Gauthier avait donc établi qu’un cycle de trois ans à la tête de l’ETP serait suffisant. Il en fera plutôt cinq. C’est qu’on a modernisé le programme, on vient de l’implanter et le monsieur voudrait bien l’observer un peu.

Cette modernisation passe notamment par une bonification de l’enseignement du jeu devant la caméra, du doublage et de la surimpression vocale. «Quand je suis entré ici comme étudiant, on me disait que je ne devrais vivre que pour le théâtre. Ça ne se peut pas. Il faut toucher à tout. Il faut vivre» , laisse tomber le coordonnateur en assurant que le théâtre demeure tout de même à la base de tout. «C’est là qu’on apprend à se connaître, à approfondir son jeu. En doublage, tu ne peux pas faire ça. C’est une technique» , illustre-t-il. Même chose pour le cinéma et la télé, même si des autodidactes, des talents naturels, se manifestent et arrivent à se faire une niche.

Un volet entrepreneurial

Ainsi, dans le cadre de ce programme qui dure désormais trois ans au lieu de quatre (ce qui signifie que deux cohortes finiront ensemble en 2021), on consacrera la première à des ateliers de jeu théâtral, avant d’aborder les aspects plus techniques du métier en deuxième année. La troisième sera consacrée aux spectacles des finissants.

Vivre de son art, ça signifie évidemment travailler, mais ça peut aussi vouloir dire créer son propre emploi, d’où l’ajout d’un volet sur l’entrepreneuriat comprenant une formation en écriture scénique et en mise en scène. «C’est possible de faire du théâtre en région. Montréal n’est pas la finalité de tout. Je crois que le volet entrepreneurial peut contribuer à ça» , de dire celui qui en connaît tout un chapitre là-dessus, à titre de cofondateur du Petit Théâtre du Nord.

Et l’évaluation?

Qui dit école, dit aussi développement et évaluation des compétences, un aspect que Sébastien Gauthier veut adapter aux exigences du métier. La notion de l’échec demeure alors au centre des discussions. «Le théâtre n’est pas seulement un truc subjectif. Quand huit profs déterminent qu’un individu n’a pas atteint le niveau de compétence voulu, ça devient objectif» , dit-il. Avoir un échec à un moment donné, poursuit-il, ne veut pas nécessairement dire qu’on ne sera jamais un acteur. D’où la possibilité de reprendre un cours l’année suivante.

Ça fait beaucoup de choses et il est à peu près impossible de tout dire, même dans un long article de journal, vous aurez compris que le monsieur est un passionné et qu’il veut insuffler une énergie nouvelle à son alma mater. Qu’il ne veut pas nécessairement tout changer. Juste faire avancer les choses. «Et j’espère que ceux ou celles qui vont nous succéder auront ce même désir et qu’ils auront de nouvelles idées» , souhaite Sébastien Gauthier.