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Jeux olympiques: Stéphanie Normand (arbitre en chef au hockey féminin) se souvient…

Stéphanie Normand

Jeux olympiques: Stéphanie Normand (arbitre en chef au hockey féminin) se souvient…

Publié le 07/02/2014

Stéphanie Normand, 39 ans. Jeux olympiques d’hiver de 2006 à Turin (32 ans), en Italie, comme arbitre de hockey en hockey féminin.

1) Rappelez-nous d’abord dans quelles circonstances vous avez été appelée à participer aux JO, la date de votre participation, le lieu, la discipline, les résultats obtenus et votre âge à cette époque.

Le 18 septembre 2005, j’ai été informée par Hockey Canada que j’avais été sélectionnée comme arbitre en chef au hockey féminin pour les JO de Turin, en Italie. J’étais tellement fière d’avoir été sélectionnée que j’en pleurais de joie! Les JO se sont déroulés du 10 au 26 février 2006. Je savais que je ne pouvais pas arbitrer le match de la médaille d’or, car l’équipe canadienne féminine se rend depuis toujours en finale de tournoi et que nous, les arbitres (de tous les pays), ne pouvons officier les matchs de notre pays. Mon but était d’arbitrer chaque match comme s’il s’agissait de mon dernier, de donner le meilleur de moi-même et d’en profiter au maximum. Je voulais me rendre le plus loin possible dans le tournoi olympique et j’ai réussi. J’ai arbitré trois parties (Russie-Suède, États-Unis–Finlande et Suisse-Italie). Je savais que je n’aurais pas une deuxième chance d’aller arbitrer aux JO, car au Canada, les femmes n’y vont qu’une fois (depuis 1998).

2) Quel est votre plus beau souvenir personnel de cette participation à ces JO? Et le moins bon souvenir? Et pourquoi?

Mon plus beau souvenir, c’est assurément le match États‑Unis c. Finlande qui a été de loin le meilleur match que j’ai arbitré de toute ma vie. J’étais tellement concentrée sur la partie que je n’ai pas remarqué qu’il y avait de la musique dans l’aréna pendant la partie. Ce n’est qu’après le match que j’ai demandé à mes juges de ligne s’il y avait de la musique dans l’aréna. Elles m’ont répondu dans l’affirmative. Je me sentais en pleine forme, je me positionnais aux bons endroits, j’ai pris de bonnes décisions. J’avais énormément de pression, car l’aréna était plein à craquer. De plus, nous, les arbitres en chef, avions une caméra sur notre casque de hockey afin que la planète entière puisse avoir notre angle de vision et certains commentateurs devaient commenter en direct à la télévision nos appels de punition. C’était la première fois que j’arbitrais avec une caméra attachée à mon casque. Avant la partie, j’étais nerveuse, mais cette nervosité est disparue dès le premier coup de sifflet. De plus, tous les encouragements que j’ai reçus de mon conjoint de l’époque, ma famille, mes amis, des gens qui m’ont connue depuis mes débuts à Saint-Eustache, des superviseurs de Hockey Canada et de mes amies arbitres d’Europe m’ont donné des ailes et m’ont fait très chaud au cœur.

Le moins bon souvenir, c’est lefait d’avoir manqué la cérémonie d’ouverture. La veille de la cérémonie, j’ai été très malade. J’ai fait une gastroentérite avec plusieurs symptômes. La gastro est une affection très contagieuse… Les médecins qui étaient en charge des officielles m’ont alors ordonné de rester confinée dans ma chambre et de me reposer afin de ne pas contaminer toute l’équipe des officielles (qui provenaient de divers pays). J’ai donc regardé la cérémonie d’ouverture à la télévision, et ce, alitée. J’aurais bien aimé y être pour entendre Luciano Pavarotti.

J’ai trouvé cela difficile, car en tant qu’arbitre, on s’entraîne toute notre vie pour être dans une grande forme physique et nous allons aux JO une seule fois. J’ai encore de la misère à croire que j’ai manqué cette cérémonie. Par contre, j’étais tellement malade et je devais me reposer pour être en grande forme lors de mon premier match…

3) Qu’est-ce qui vous a le plus impressionnée lors de ces JO de façon générale et de façon personnelle?

De façon générale, j’ai été très impressionnée par l’ampleur des JO et par les bénévoles. Il y avait des voies réservées aux athlètes dans les rues de Turin, des bénévoles partout qui nous aidaient et qui étaient au‑devant de nous à tout moment lors de nos déplacements et à l’aréna. Les médias étaient omniprésents et il y avait une section réservée, avec des bureaux dans une grande partie des estrades. Je n’ai jamais vu autant de journalistes au même endroit. Ils venaient de partout dans le monde.

De façon plus personnelle, ce qui m’a le plus impressionnée était le professionnalisme des gens que je côtoyais (athlètes, bénévoles, journalistes, entraîneurs et autres). Il y avait aussi le niveau de sécurité qui était à son maximum. Nous devions passer tous nos sacs, équipements sur des convoyeurs avec rayons X (comme à l’aéroport) avant d’entrer sur le site. Il y avait des détecteurs de métal. J’ai aussi été très impressionnée par la cérémonie de fermeture des JO. Je me souviens d’avoir téléphoné à mon conjoint de l’époque pour lui mentionner à quel point c’était grandiose. De plus, la gentillesse des gens, bénévoles, athlètes, collègues était extraordinaire.

4) Quels conseils donneriez-vous à un athlète comme Mikaël Kingsbury (épreuve des bosses) qui en sera à une première participation aux JO? Et à des athlètes comme Alexandre Bilodeau (épreuve des bosses) et Charline Labonté (hockey féminin) qui y retournent à nouveau, et peut-être pour une dernière fois?

Le meilleur conseil que j’aurais à donner à Mikaël Kingsbury est de donner le meilleur de lui-même, de ne pas se laisser déconcentrer sur l’ampleur de l’évènement, de savourer chaque moment, de toujours avoir un «mentor» pas trop loin et de vivre ces JO comme s’ils étaient ses derniers. De plus, de prendre beaucoup de repos et de beaucoup s’hydrater avant, pendant et après la compétition. Aussi, visualiser le podium.

Les conseils que je donnerais à Alexandre Bilodeau et à Charlie (Charline Labonté) seraient de vivre ces JO au moment présent, de donner le meilleur d’eux du début à la fin, de bien visualiser le podium, de se reposer et s’hydrater… Et bien sûr, d’aller à la boutique olympique pour rapporter des souvenirs de cet évènement majeur… (C’est ce que j’ai fait!)

5) Comptez-vous regarder les JO d’hiver et quelle discipline allez-vous suivre de façon plus particulière?

C’est certain que je regarderai les JO de Sotchi. Je connais beaucoup de gens qui participeront pour représenter le Canada et aussi j’ai beaucoup d’ami(e)s arbitres de plusieurs pays qui vont y être comme arbitres. J’ai d’ailleurs assisté au mariage d’une amie arbitre d’Angleterre l’automne dernier. Je souhaite que le Canada gagne le plus de médailles d’or possible. Aux officielles: je leur souhaite de se rendre le plus loin possible dans la ronde des médailles. Cela me remémore toujours de très bons souvenirs. Je vais regarder les matchs de hockey féminin, hockey masculin, le patinage de vitesse, le ski acrobatique, le snowboard et autres. Bref, j’adore tous ces sports d’hiver.

6) Qu’est-ce que les JO vous ont apporté? Est-ce que l’on vous en parle encore aujourd’hui? Est-ce que cela a changé votre vie?

Ces JO m’ont apporté la détermination, le respect, la confiance en soi, la persévérance, la discipline, la volonté de toujours vouloir se dépasser en se fixant des objectifs toujours plus hauts. J’ai appris à travers ces années que la volonté d’atteindre un objectif doit être puisée au fond de soi et que personne ne peut faire les efforts à notre place. Cela doit venir de nous. On me parle des JO encore aujourd’hui et cela me remémore d’excellents souvenirs lorsque j’en reparle. C’est pour ces raisons que je considère que les JO ont changé ma vie en ce sens que tout ce que j’ai appris (en étant déterminée à m’entraîner pendant toutes ces années et en me fixant des objectifs toujours plus hauts) peut être transposé intégralement dans ma vie de tous les jours. De plus, j’ai appris qu’en traitant les autres avec respect, on attire littéralement le respect.

Il est bon de se rappeler que les arbitres au hockey doivent toujours être en excellente forme physique, car nous n’avons pas de périodes de repos (comme les joueurs) pendant un match. De plus, pour être capable de suivre tous les jeux d’un match, le coup de patin doit être à son meilleur. Par exemple, nous devons être en forme pour ne pas avoir mal aux jambes lors d’une période de prolongation d’un match, car si nous mettons le focus sur nos jambes, cela affectera la prise de décision. C’est une des raisons pour laquelle je m’entraînais autant et que j’ai suivi de nombreux cours de power skating, afin d’être capable de prendre les meilleures décisions possible tout au long de ces années d’arbitrage.

7) Enfin, que faites-vous comme travail aujourd’hui? Où résidez-vous? Êtes-vous mariée? Avez-vous des enfants? Pratiquez-vous toujours une discipline sportive?

Je suis représentante pharmaceutique pour Galderma Canada. Je représente des produits dermatologiques en rosacée. J’habite toujours dans les Basses-Laurentides, c’est-à-dire à Boisbriand. Séparée depuis bientôt deux ans, je suis intéressée à rencontrer quelqu’un avec qui je pourrai partager ma vie. Je n’ai pas d’enfant à ce jour. J’aime bien voyager pour découvrir de nouveaux pays. Mon pays préféré est la Russie. J’y suis allée deux fois et j’adore l’architecture et la nourriture. L’hiver, je donne des cours de patin à ma nièce Olivia lors du patin libre à Saint-Eustache, je joue au hockey dans des ligues de garage masculines et je vais au gym pour garder la forme. L’été, je fais du vélo de route et je joue également au golf. J’ai de plus commencé à jogger il y a deux ans et à jouer un peu au tennis, l’été dernier. La forme fait partie intégrante de ma vie.

Bonne chance aux athlètes canadiens lors de JO de Sotchi!