logo journal leveil
icon journal
<strong>Une saison dans la vie du PTDN</strong>

L’auteure Sarah Berthiaume, en compagnie des trois directeurs artistiques du PTDN, Luc Bourgeois, Mélanie St-Laurent et Sébastien Gauthier.

Une saison dans la vie du PTDN

Publié le 15/06/2012

Dans la vie, rien n’est jamais trop simple ni trop compliqué. Une pièce de théâtre, par exemple: on prend un texte, trois ou quatre acteurs qui en apprennent les lignes par cœur en tentant d’y mettre de l’intention et de «l’expression faciale». Vraiment?

Au Petit Théâtre du Nord (PTDN), on aime se compliquer les choses davantage. Tenez, juste pour expliquer le choix de Sarah Berthiaume comme auteure de la prochaine production (Les Orphelins de Madrid, à compter du 22 juin), il a fallu un préambule hallucinant à trois et même quatre voix qui s’entremêlaient, renchérissaient, s’appuyaient, dans une sorte de concert rhétorique fort distrayant qu’il fallait bien suivre, une plume à la main, une fourchette dans l’autre.

Autour de la table, trois des quatre membres fondateurs du PTDN, les comédiens Luc Bourgeois, Sébastien Gauthier et Mélanie St-Laurent, de même que Sarah Berthiaume. C’est avec eux que nous amorçons une série d’articles qui nous permettra de traverser les étapes d’une saison normale dans la vie d’une compagnie théâtrale.

Or, sachez que la présente saison a débuté à la minute même (peut-être avant) où s’est terminée la précédente, c’est-à-dire en août 2011. Pendant qu’on passait le balai, la réflexion s’amorçait déjà quant à la suite des choses.

Le PTDN étant une compagnie de création, il faut donc trouver rapidement un(e) auteur(e) et planifier les premières rencontres. Le PTDN s’étant par ailleurs donné le mandat d’observer l’humain et sa façon de se comporter dans la société actuelle, qui plus est par le biais de la comédie, il importe donc de dénicher l’auteur dont le style épousera d’emblée cette «culture d’entreprise».

Le sexe importe tout autant puisqu’il est établi qu’un homme et une femme n’écrivent pas de la même manière et portent un regard différent sur les choses, l’un s’attardant de façon générale au contexte et à la mise en forme, alors que l’autre se concentre davantage sur la situation. C’est pour ça qu’au PTDN on s’efforce d’assurer une certaine alternance à ce chapitre.

Diplômée en interprétation de l’Option-Théâtre de Lionel-Groulx, en 2007, Sarah Berthiaume a depuis écrit une bonne demi-douzaine de pièces et c’est pour la poésie, l’absurde, l’humanité et l’authenticité qui s’en dégagent qu’on l’a approchée. Souvent, le PTDN propose une thématique, mais dans ce cas précis, on lui a donné carte blanche, avec deux indications précises: «Il faut que ça te ressemble et que ce soit une comédie.»

L’idée de situer l’action au mythique restaurant Madrid plaît d’emblée. Reconnue pour sa décoration extravagante (pour ne pas dire autre chose), cette halte routière située sur l’autoroute 20, à la hauteur de Drummondville, est aussi traditionnellement reconnue comme un lieu d’échange où les parents divorcés troquent leurs enfants au rythme des tours de garde. Ce sera le thème à exploiter.

Sarah part donc avec son idée et revient en décembre. Une première mouture de la pièce, en fait une description de chacune des scènes, est alors proposée avec un synopsis: dans le contexte que l’on sait, la fermeture du Madrid aura forcément des répercussions sur au moins une famille, celle de Léa et de ses parents divorcés, Alexandre et Isabelle. L’auteure y voit alors le prétexte à poser un regard amusé et moderne sur la déroute de la vie à deux.

La chose est bien accueillie, puis une discussion débouche sur les modifications à apporter: ramener ici et là le niveau d’absurde à un certain degré, s’assurer que le public pourra s’identifier aux personnages, voir à ce que le rythme et la progression de l’intrigue soient constants, par exemple. Une étape cruciale.

«C’est rassurant, aussi, indique Sarah Berthiaume. Ça permet de savoir avec quelle matière on va travailler.» Et la démarche n’est pas différente quand on écrit pour soi-même, dira-t-elle.

À la mi-avril, le texte final (enfin presque) est livré. Entre-temps, le metteur en scène (en l’occurrence Sylvain Bélanger) aura été embauché et de nombreuses autres modifications auront été apportées au texte. Le travail, en fait, n’est jamais fini. «C’est ça, la création, note Mélanie St-Laurent. Si nous montions un Molière, on ne pourrait pas appeler l’auteur pour lui demander de changer ceci ou cela dans son texte, ou le questionner sur le sens de certaines scènes.»

Et une fois qu’on a le texte, les acteurs et le metteur en scène, on a tout? Bien sûr que non. Il faut imaginer tout cela dans un décor, avec costumes, éclairages et environnement sonore, et c’est là qu’interviennent les concepteurs. Mais bon, ce sera pour la prochaine fois.