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<strong>Se relever d’une sombre dépression grâce à la peinture</strong>

Benoît Gagnon avec sa conjointe Linda Lee

Se relever d’une sombre dépression grâce à la peinture

Publié le 20/07/2013

Désormais, appelez-le Ben Wah. C’est de son nom chinois que Benoît Gagnon – pas l’animateur de télévision, tient-il à préciser – a signé la trentaine de toiles qui s’accumulent dans sa demeure de Pointe-Calumet depuis l’hiver 2012. Après un grave accident de voiture, deux accidents cérébraux vasculaires (ACV) et une menace de sclérose en plaques, Benoît Gagnon s’est relevé d’une sombre dépression grâce à la peinture, et à sa «tête de cochon».

«De 2001 à 2010, j’avais environ 300 pilules par semaine dans le corps», se rappelle-t-il. Dès 2001, les migraines causées par les séquelles de son accident de voiture ont envahi le quotidien de Benoît Gagnon. Le médecin a freiné toutes ses activités neuf ans plus tard, alors qu’il perdait connaissance régulièrement. Plus question de se rendre au travail sept jours sur sept pour l’entrepreneur en construction. En février 2011, deux ACV lui ont enlevé 50 % de mobilité du côté droit. Et finalement, des plaques décelées au cerveau ont annoncé la présence d’une maladie dégénérative: la sclérose en plaques.

Pour Ben Wah, l’art a fait fuir le sentiment d’impuissance et d’ennui. Patiente, Lise Desjardins, artiste en arts visuels, lui a enseigné plusieurs techniques de peinture. «Parfois, je n’étais même pas capable de tenir le pinceau», soupire Ben Wah. «C’est un élève ouvert à tout!», admet Lise Desjardins.

Le sous-sol rempli d’œuvres «thérapeutiques», le couple attend aujourd’hui depuis plus de six mois le rendez-vous qui déterminera à quel degré Ben Wah est atteint de la maladie. Il est possible qu’il se déplace du salon à son atelier en fauteuil roulant d’ici un an. «Soit je prends ça en riant, soit je prends ça en braillant», résume celui qui avoue être tombé plusieurs fois dans l’escalier et avoir maintenant un bon «coussin fessier».

«Je veux l’aider, mais il ne veut pas se faire servir. Il continue de me préparer mon café le matin», dit fièrement Linda Lee, à ses côtés depuis 20 ans. Le grand fonceur n’est pas seul. Cette maladie du système nerveux touche 20 000 Québécois, d’après la Société canadienne de la sclérose en plaques. «Je ne l’avais jamais connu comme ça, raconte Linda Lee, sa conjointe. C’était une personne tellement active. Je ne pensais jamais qu’il serait aussi fort.»

Entre les journées passées au lit et les crises de sclérose en plaques, où Ben Wah perd quelque peu la mémoire et la parole, son esprit d’entrepreneur se penche sur un vieux rêve: celui d’acheter une ferme et d’y employer des gens handicapés ou déficients. «J’avais déjà travaillé avec des gens différents, mais je les comprends encore mieux maintenant, explique Benoît Gagnon. Je veux leur donner une chance d’être eux-mêmes.»

Si les prochains rendez-vous se déroulent bien, le couple de Pointe-Calumet pourrait un jour démarrer une entreprise adaptée, subventionnée par Emploi-Québec, dans le cas où 60 % et plus du personnel présente un handicap.

«Tu peux t’isoler toi-même, pleurer, aller chercher de l’aide aux associations ou tenir debout pour atteindre tes objectifs. Avec ma tête de cochon, j’ai décidé de foncer», s’exclame fièrement Ben Wah, prêt à partager sa force avec tous ceux dans le besoin.