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<strong>La vie dure</strong>

La vie dure

Publié le 23/05/2012

On le sait, certains préjugés ont la vie dure. C’est vrai dans la vie de tous les jours, mais aussi dans le merveilleux monde du sport et plus particulièrement dans le parfois petit monde de notre beau sport national, le hockey. L’un de ceux-là (les préjugés) veut que la coupe Stanley ne veuille rien dire pour les joueurs européens. Combien de fois a-t-on laissé entendre que les Européens n’ont qu’une seule envie, retourner chez eux la saison terminée et le plus tôt sera le mieux. Ou encore qu’ils ont plus le cœur à la fête qu’à bloquer des lancers et que leur préoccupation principale est de récolter de beaux dollars américains qu’ils dépenseront à faire la fiesta dans leurs pays d’origine.

Remarquez que la dernière escapade en séries des lurons Andrei Kostitsyn et Alexander Radulov n’aura rien fait pour changer cette perception bien ancrée chez les «rednecks» de notre sport national. La direction de l’équipe s’est empressée de suspendre les deux récalcitrants, ses deux meilleurs compteurs jusque-là, et tout le monde ou presque (sauf Don Cherry) a loué le courage des Predators. Aurait-on eu ce courage s’il s’était agi d’un Webber, Suter, Gill ou Bouillon? On raconte que dans les années 1970, les Flyers alignaient un compteur prolifique du nom de Reggie Leach qui n’en avait malheureusement que pour la dive bouteille. À la veille d’un match important, Leach rate un entraînement et on le retrouve ivre mort chez lui. Même la douche froide n’y fit rien, seules trois bonnes bières froides réussirent à le ramener à lui. Le capitaine Bobby Clarke plaida alors sa cause auprès de son entraîneur qui ne l’avait finalement pas suspendu; le lendemain Leach marquait cinq buts dans la victoire des siens sur les Bruins et gagnait le trophée Conn Smythe malgré la défaite des Flyers en finale contre les Canadiens. Une bien belle histoire qui ne risquait pas de se reproduire à Nashville. Vous voyez Shea Webber implorer son entraîneur de garder Radulov et Kostitsyn dans l’alignement? Dale Hunter a réduit le temps de glace des Ovechkin et Semin, et plus récemment, Tortorella a cloué Marian Gaborik au banc pour avoir omis de bloquer un lancer. Vous pensez qu’on aurait réservé le même sort à Crosby, Lecavalier ou Stamkos?

On aura beau dire et beau faire, les Européens font maintenant partie du décor de la LNH. Les quatre équipes qui forment présentement le carré d’as qui se disputent la coupe Stanley alignent rien de moins que trente joueurs européens. Onze sont au New Jersey, dont les Kovalchuk, Elias, Sykora, Zubrus et Ponikarovsky, et neuf s’alignent à Phoenix, dont les Boedeker, Hanzal et Roszival. Les Rangers comptent sur les Anisimov, Fedotenko, Gaborik, Zucarello, sans oublier le roi Henrik Lundqvist. Quant aux Kings, ils n’en alignent que trois, mais l’un d’eux a pour nom Anze Kopitar. Je trouve personnellement que ça fait pas mal d’Européens qui n’ont pas l’air trop pressés de retourner chez eux! Et si vous ajoutez à ça que sept des dix meilleurs espoirs de la prochaine séance de repêchage proviennent des «vieux pays», nos chauvins en auront encore pour quelques années à déblatérer sur ces «étrangers». Oui, les préjugés ont la vie dure!