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<strong>Ces futiles comparaisons</strong>

Ces futiles comparaisons

Publié le 09/04/2013

Vous savez, quand vient le temps de discuter des contrats faramineux de nos joueurs de hockey, comment nous sommes portés vers les comparaisons. «Comment un gars qui pousse une rondelle peut-il gagner plus qu’un cardiologue qui sauve des vies?» ou encore «Un gars qui n’a même pas fini son secondaire fait plus d’argent à bloquer des lancers que des scientifiques bardés de diplômes à améliorer nos conditions de vie», et j’en passe des meilleures. C’est tout simplement parce que nous n’avons pas compris que toute comparaison n’est jamais bonne à faire.

Strictement dans le monde du sport, ces mêmes comparaisons sont tout aussi futiles. Prenons le cas de Tiger Woods. En 2012, le Tigre a accumulé 9,1 M$ en bourses seulement et ses revenus hors terrain pour la même année s’élevaient à rien de moins que 77 M$ pour un grand total de 86 M$(1). En 2007, le même golfeur avait bénéficié d’un revenu de 122,7 M$, presque la même somme qu’en 2009, l’année de cette déchéance matrimoniale qui devait lui coûter une diminution de revenus de près de 30 M$ l’année suivante. Lorsqu’on pense que Tiger ne participe qu’à une douzaine de tournois par année, vingt tout au plus, les salaires de Shea Weber (14 M$), Brad Richards (12 M$), Illia Kovalchuk (11 M$) et Vincent Lecavalier (10 M$) font figure de parents pauvres, eux qui doivent disputer 82 matchs en saison régulière, sans compter les interminables séries éliminatoires. Et que dire des 162 matchs du pauvre Yankee Alex Rodriguez (30 M$), de Payton Manning qui mène une vingtaine de parties pour une maigre pitance (20 M$) ou Kobe Bryant qui se tape 66 matchs plus les séries pour un ridicule 27 M$.

Quels sont les risques de blessure pour le Tigre outre celle à un genou à la suite d’une maladroite sortie de fosse de sable? Le seul temps où Tiger aurait pu subir une commotion cérébrale eût été si l’ex-madame Woods l’avait atteint avec le fer 9, qui a plutôt fracassé la lunette arrière du luxueux véhicule de monsieur. Par ailleurs, et pour beaucoup moins d’argent (ici, nous devrions pleurer), hockeyeurs et footballeurs sont à risque de commotion et blessure à chaque match et ils sont empêchés d’exercer leur art par des défenseurs, qui le font par des moyens plus ou moins légaux, au gré de la vigilance des arbitres. Comme toute comparaison n’est jamais bonne à faire, bien sûr que le golfeur ne peut pas se reposer sur ses lauriers s’il veut faire de l’argent; il doit produire s’il veut rafler la cagnotte à chaque tournoi. Mais au golf, probablement mieux que partout ailleurs, la réputation paie. Arnold Palmer (36 M$), Jack Nicklaus (28 M$), Greg Norman (17 M$) et Gary Player (14 M$), qui ont rangé sacs et bâtons en compétition depuis longtemps viennent respectivement aux 3e, 4e, 8e et 10e rangs des golfeurs les mieux payés de 2012 grâce à leurs endossements de produits, conférences, apparitions et autres babioles. Bien que les salaires ici cités des autres sportifs ne fassent pas état de leurs revenus de commandite, il y a fort à parier qu’ils n’approchent pas ceux du Tigre chez les actifs ou d’Arnold et Jack chez les retraités.

Et il en va de même pour les concours du genre qui-est-le-plus-grand-joueur-de-tous-les-temps; impossible de comparer Howe et Richard aux Gretzky et Lemieux ou encore aux Crosby et Stamkos pas plus que Mantle à Jackson ou à Rodriguez, ni Snead à Palmer ou Nicklaus et à Tiger. Mieux vaut profiter des talents des vedettes de l’heure et oublier toutes ces comparaisons finalement boiteuses. Carpe diem…

 

(1) Golf Digest – Mars 2013