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Mieux prévenir l’exploitation sexuelle

Diane Veillette et Josée Mendales

Mieux prévenir l’exploitation sexuelle

Publié le 16/02/2014

À l’occasion de leur 25e anniversaire de fondation, les Ressources communautaires ACJ+ ont invité, au mois de janvier dernier, deux agentes de police du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) à donner une conférence sur la lutte contre l’exploitation sexuelle. À cette occasion, elles ont présenté leur programme Les survivantes basé sur l’intervention d’anciennes victimes.

Il y a quatre ans, la SEMCJ (section des enquêtes multidisciplinaires et coordination jeunesse) a entamé une réflexion pour améliorer son approche pour aider les victimes à s’en sortir et pour prévenir efficacement l’exploitation sexuelle. «Nous avons rencontré de nombreux intervenants sociaux et médicaux pendant 18 mois, pour mieux comprendre. Puis, nous avons lancé le programme en 2011», explique Josée Mensales, agent de concertation du projet.

Concrètement, ce programme de prévention vise à encourager la prise de conscience des personnes vulnérables. Il intègre un volet information, à destination tant des policiers que des intervenants sociaux. C’est dans ce cadre, et à la demande de l’AJC+, que Diane Veillette et Josée Mensales sont intervenues à la Maison du citoyen, de Saint-Eustache, devant 75 acteurs du territoire: «Nous travaillons essentiellement sur Montréal, mais nous aidons également les territoires limitrophes, car il y a des victimes ici aussi».

L’action la plus innovante de ce programme est de profiter de l’expérience d’anciennes victimes, «car beaucoup voulaient nous aider», poursuit Josée Mensales. Ainsi, le service fait appel à cinq survivantes qui interviennent directement auprès des personnes vulnérables. «Ces survivantes ont eu la force de sortir de l’emprise d’un souteneur, de reprendre leur vie en main. Elles doivent avoir une certaine pédagogie. Elles ne sont pas là pour raconter une histoire d’horreur. Elles ne doivent plus frayer avec le milieu», d’expliquer la policière.

Cindy, l’une des cinq survivantes, est venue raconter son expérience poignante. «Je n’étais ni une enfant battue, ni abusée, simplement une adolescente rebelle…», a-t-elle dit pour mieux faire comprendre que personne n’est à l’abri.

Et il aura suffi d’une mauvaise rencontre, de s’enticher du mauvais gars pour que son destin bascule. «Nous avons commencé à faire de la fraude dans les magasins, mais on s’est fait prendre. Pour rembourser nos dettes, mon compagnon m’a suggéré de devenir danseuse…» Elle entre alors dans un engrenage infernal: «Quand j’ai gagné assez d’argent pour rembourser, il m’a encouragé à continuer en me promettant la belle vie.» Son compagnon est devenu alors de plus en plus contrôlant et très violent. Pour tenir le coup, Cindy est tombée dans la drogue. Elle trouvera la force de s’en sortir avec l’aide d’une amie et de sa mère. Depuis, elle est retournée sur les bancs de l’école et a entamé une nouvelle vie.

Un témoignage saisissant, apprécié par les acteurs sociaux du territoire. «On ne peut pas dire que le phénomène soit en progression, mais nous avons des cas sur notre territoire, c’est sûr», notent Chantal et Hélène, infirmières au CLSC. «Ici, le phénomène est plus caché. C’est de la prostitution à domicile ou dans les hôtels. Ce programme est très intéressant, mais le plus dur est d’encourager les filles à faire le premier pas pour s’en sortir, à demander de l’aide…»